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Les Aventures Fantastiques de Roberto 
 
 
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SUPREME VEILLE

 
 
 
PROTECTION SACD (Société des Auteurs Compositeurs Dramatiques) - dépôt d'enregistrement 
 
 
(Titre d’origine : BENIS SOIENT LES POETES)  
 
 
TITRE : LES AVENTURES FANTASTIQUES DE ROBERTO  
 
 
Dans : 
 
« SUPRÊME VEILLEE » 
(9ième épisode) 
 
ROBERTO 
MAMOUZELLE 
AUGUSTIN 
TANIA DESPINS 
LE COMTE DE LA BOUCHE6EN-BIAIS 
SYLVESTRE (Le Facteur) 
 
LIEU : « L’AUBERGE DE LA LICORNE » (Située à l’écart du village de maison-Du-Bois Doré, dans le Midi de la France) 
 
GENRE : Fantastico-Poétique 
 
EPISODE 9 : «SUPRÊME VEILLEE » (1998) 
Deuxième partie de la pièce « Bénis soient les poètes » (6 personnages) 
 
 
AUTEUR : CASALI EMILIEN 
 
http://emiliencasali.populus.ch/ 
Contact : Emilien CASALI – (France) 
e-mail casali-emilien1@orange.fr 
 
 
 
PROLOGUE 
 
ROBERTO, TANIA DESPINS, LE COMTE, MAMOUZELLE 
 
L’action se déroule à l’Auberge de la Licorne située dans le Midi de la France… 
 
Roberto, surgit des chambres et se dirige vers la fenêtre 
 
« L'automne déjà ! Mais pourquoi regretter un éternel soleil, si nous sommes engagés à la découverte de la clarté divine, -loin des gens qui meurent sur les saisons. L'automne. Notre barque élevée dans les brumes immobiles tourne vers le port de la misère, la cité énorme au mille amours qui m'ont crucifié ! Elle ne finira donc point cette goule reine de millions d'âmes et de corps morts et qui seront jugés ! Je me revois la peau rongée par la boue et la peste, des vers pleins les cheveux et les aisselles et encore de plus gros vers dans le coeur, étendu parmi les inconnus sans âge, sans sentiments.. .j'aurais pu y mourir. L'affreuse évocation ! J'exècre la misère. Et je redoute l'hiver parce que c1est la saison du confort ! Quelque fois je vois au ciel des plages sans fin couvertes de blanches nations en joie. Un grand vaisseau d'or, au dessus de moi, agite ses pavillons multicolores sous les brises du matin. J'ai créé toutes les fêtes, tous les triomphes, tous les drames. J'ai essayé d'inventer de nouvelles fleurs, de nouveaux astres, de nouvelles chairs, de nouvelles langues. J'ai cru acquérir des pouvoirs surnaturels. Eh bien, je dois enterrer mon imagination et mes souvenirs ! Une belle gloire d'artiste et de conteur emportée ! Moi ! Moi qui me suis dit mage ou ange, dispensé de toute morale, je suis rendu au sol, avec un devoir à chercher, et la réalité rugueuse à étreindre ! Paysan ! Suis-je trompé ? La charité serait-elle soeur de la mort, pour moi ? Enfin, je demanderai pardon pour m'être nourri de mensonge. Et allons. Mais pas une main amie ! et où puiser le secours ? »  
 
Arthur Rimbaud (Adieu - Extrait d'une saison en enfer) 
 
TANIA, qui a fait son entrée un peu plus tôt 
La réalité est faite ainsi ! tôt ou tard elle s'affiche un peu plus clairement à nos yeux, jeunes insouciants que nous fûmes. 
 
ROBERTO, se parlant à lui-même 
Je crois bien qu'on m'épiait !? 
 
TANIA 
Mais enfin, à chacun son histoire, n'est-ce pas ? N'ayez crainte, je vais pas vous mordre. 
 
ROBERTO, se parlant à lui-même 
Dois-je me retourner ? 
 
TANIA 
Mamouzelle est-elle réveillée ? 
 
ROBERTO 
Je ne le pense pas. 
 
TANIA 
Eh bien j'attendrai jusqu'à son réveil. 
 
ROBERTO, s'apprête à partir 
Bonne matinée, Madame ! 
 
TANIA, le retient par le bras 
Attendez ! ne partez pas. 
 
ROBERTO 
Que me veut-elle, à la fin ? 
 
TANIA 
Serait-ce vous le poète dont m'a beaucoup parlé Mamouzelle ?  
 
ROBERTO 
Ce n'est pas moi. 
 
TANIA 
C'est bien vous qui voyagez en solitaire, n'est-ce pas ?  
 
ROBERTO 
Vous faites erreur, Madame. 
 
TANIA 
C'est bien tous les mêmes, ces voyageurs: ils ignorent tout le tE autrui; ils font les fiers. Mais de quoi avez-vous peur, enfin ?.. que je découvre la rancune et le désir amer en vous...comme ce fut le cas lors dE votre récent exposé dont je fus témoin ? 
 
ROBERTO 
Laissez-moi tranquille, Madame ! 
 
TANIA 
Partir, partir, fuir la patrie ! C'est donc cela qui se cache derrière le voyageur ! ? 
 
ROBERTO 
N'insistez plus, Madame ! 
 
LE COMTE, sort de la chambre 
« Amoureux de la vie, le voyageur suit son étoile, en dehors du temps qui passe, il est intemporel; libéré du joug de J'identité, son astre s'éloigne sur les rives magistrales de sa légende personnelle... Présente partout où que J'on soit sur cette planète, quelque soit le pôle nord sud de l’hémisphère, la chaleur amicale que lui procure le sédentaire éblouit J'âme de notre rêveur solitaire... Eprouvé par la hantise et la vanité humaine, tous ceux qui le croiseront des yeux en chemin n'hésiteront pas à lui prodiguer soins et couverts; ils savent que leur hôte cherche un chemin, un accès qui mène à la paix intérieur... Instruit par la sagesse des hommes rencontrés ça et là sur cette bonne vieille terre, il prendra conscience de sa propre vérité. Une fois assagi, notre doux voyageur rencontrera l'Amour qui J'a tant fait patienté Que d'obstacles devra-t-il traverser ! 
 
 
LE COMTE, toujours 
Madame est satisfaite, à présent ? 
 
(Roberto a quitté les lieux entre temps) 
 
TANIA 
L'explication était toute simple ! Alors pourquoi ne l'a-t-il pas confié 
lui même ?  
 
LE COMTE 
Sous l'effet de la menace, le poète ne trouve mot. 
 
TANIA 
Pauvre garçon ! 
 
LE COMTE 
C'est outrageant pour lui. 
 
TANIA 
La défense a parlé; dois-je être condamnée ? 
 
LE COMTE 
Je vous trouve bien éloquente ! Madame. D'ailleurs ! qui donc vous a permis d'offenser un ami ? 
 
TANIA 
Objection, votre honneur ! 
 
LE COMTE 
Qui êtes-vous, Madame, pour vous moquer ainsi de moi ? 
 
TANIA 
Cela ne vous regarde pas, Monsieur ! Ce n'est pas vous que je viens rendre visite. 
 
 
 
LE COMTE 
Je vois ! je vois...l'on traite autrui de lâche ! et l'on est même pas capable de signer son acte. 
 
TANIA 
Je vous prierai d'employer un autre ton avec moi, Monsieur. 
 
LE COMTE 
A commencer par vous, Madame. 
 
MAMOUZELLE 
Que se passe-t-il ici ? On ne peut plus faire la grâce matinée tranquillement. 
 
TANIA 
Vous tombez bien, Mamouzelle ! Vous allez pouvoir renvoyer ce paltoquet dans sa chambre qui ne cesse de m'offenser depuis cinq minutes. 
 
LE COMTE 
J'ai mal entendu ? Vous voulez bien répéter. 
 
MAMOUZELLE 
Vous n'êtes plus un enfant; vous allez retourner dans votre chambre ! je ne veux pas de scandale dans mon Auberge. C'est compris ? 
 
LE COMTE 
J'exige des excuses, Madame ! 
 
TANIA 
Je ne répondrai qu'en présence de mon avocat. 
 
LE COMTE 
Je vais faire un malheur si elle continue à me narguer autant.  
 
MAMOUZELLE 
Holà ! Holà ! Pas de chahut dans mon établissement. Dans votre chambre immédiatement ! 
 
LE COMTE 
Ecartez-vous, Mamouzelle, j'ai un compte à régler avec madame !  
 
TANIA 
Je vous préviens, Monsieur… je pratique la boxe Française.  
 
MAMOUZELLE 
Dans votre chambre immédiatement ! Christophe Rodolphe Charles Henri et j'en passe ! 
 
LE COMTE 
Je n'irai nulle part ! 
 
TANIA 
Vous l'aurez cherché, Monsieur. 
 
MAMOUZELLE 
Vous n'allez pas vous y mettre ! vous aussi ? 
 
LE COMTE 
Laissez-la donc, puisqu'elle insiste ! Elle veut se mesurer à moi. 
 
Tania administre un coup de savate dans les côtes du Comte; puis elle le met KO avec le poing gauche. Le Comte est à présent allongé, inerte, sur le sol. 
 
 
FIN DU PROLOGUE 
 
------------ 
 
 
ACTE 1 / SCENE 1 
 
TANIA DESPINS, MAMOUZELLE, LE COMTE, AUGUSTIN 
 
TANIA 
Voila qui vous apprendra à vouloir vous mesurer à une femme mon cher !  
 
MAMOUZELLE 
Je vous conseille de ne pas en rajouter, monsieur le Comte.  
 
AUGUSTIN, sort des chambres 
C'est quoi tout ce vacarme ? (Il aperçoit le comte qui se tord dans tous les sens) 
Mais dites-moi, Comte, que vous me semblez mal en point. 
 
MAMOUZELLE 
Laissez-le Comte tranquille, Augustin. Il n’est pas d'humeur à vous répondre... après ce qu'il vient juste de vivre. 
 
(Le Comte retourne dans sa chambre) 
 
AUGUSTIN 
Et moi je ne suis point d'humeur à subir un tel boucan matinal… juste au moment ou mon rêve devenait intéressant ! Songez que j'étais sur le point d'atteindre le Nirvana, quand soudain... 
 
MAMOUZELLE 
Je vous préviens, mon garde du corps est ici, alors, rangez vos poings ! 
 
AUGUSTIN 
Tout de même ! Avouez que dans un lieu aussi calme que le vôtre, être dérangé de bon matin... 
 
MAMOUZELLE 
N'en parlons plus ! 
AUGUSTIN 
Ah, mais je vois que Mamouzelle a reçu de la visite.  
 
MAMOUZELLE 
Tania est une amie de longue date. 
 
TANIA 
Je parie que vous êtes Augustin le poète dont Mamouzelle m'a vanté les mérites ! Je suis Tania Despins. Enchantée ! 
 
AUGUSTIN 
« L'Automne nous enverrait-il sa plus belle créature ? Femme ! Ce que j'aime votre fière allure; Vous êtes comme un soleil resplendissant dans ma vie, charmante à souhait, câline à l'infini. En ces temps humides, le poète a besoin de vous, d'une compagne aimante, toujours prête à tout lui offrir, sans que celle-ci ne lui réclame la moindre faveur, et que la douce Dame le temps d'une saison, emportée dans son élan généreux, nous déclame son plus beau chant, une ritournelle qui fera chavirer nos tendres coeurs. Il faut que cet hymne à l'Amour ne meure jamais ! Puisse-t-il encore triompher sur la colère des hommes ! Puisse-t-il les mettre à terre ! Les temps nouveaux sont venus à la prière... Cessez le feu, Messieurs ! Halte à la Guerre ! Ecoutez donc cette magnifique louange ! Et faites en sorte que le monde change. Puisse t il enfin respirer les couleurs de la paix ! » 
 
TANIA 
Dites donc, Mamouzelle, votre ami le poète est-il toujours aussi exalté ? 
 
MAMOUZELLE 
Ce matin seulement. (Puis elle s'adresse à Augustin) Vous en faites beaucoup trop, Augustin. Allez donc vous faire chauffer un café à la cuisine ! 
 
AUGUSTIN 
En générale, c'est vous qui le préparez. 
 
MAMOUZELLE 
Pas ce matin, en tous cas ! Après ce que je viens d'entendre. (elle l'entraîne par le bras vers la cuisine) Quel toupet ! 
 
TANIA 
Quelque chose vous aurait-il chagriné, Mamouzelle ?  
 
MAMOUZELLE 
C'est bien la première fois qu'il est aussi pleinement inspiré.  
 
TANIA 
C'est parce qu'il apprécie vos amis. 
 
MAMOUZELLE 
Et de quelle manière ! 
 
TANIA 
Vous ne seriez pas un petit peu jalouse, ma chère ? 
 
MAMOUZELLE 
Et pour qui donc ? 
 
TANIA 
Pour un poète qui vous aurait fait tourner la tête. 
 
MAMOUZELLE 
En connaissez-vous un, ma chère ? 
 
TANIA 
Je crois bien qu'il n'a d'yeux que pour vous. 
 
MAMOUZELLE 
Je présume que vous passerez la nuit à l'Auberge. 
 
 
TANIA 
Avec tous ces poètes de passage, je doute qu'il puisse rester une chambre. 
 
MAMOUZELLE 
Que cela vous rassure, ils ne sont pas aussi encombrants qu'ils le paraissent. 
 
TANIA 
C'est donc d'accord, je peux rester ? 
 
MAMOUZELLE 
Mais bien sûr ! 
 
TANIA 
Je vous remercie infiniment. 
 
MAMOUZELLE 
Que suis-je bête, j'allais faire une erreur ! (se parlant à elle même) Je peux toujours lui proposer ma chambre. 
 
TANIA 
Un problème, Mamouzelle ? 
 
MAMOUZELLE 
Ca ne vous dérangerait pas d'occuper ma chambre pour cette nuit ?  
 
TANIA 
Pas du tout. 
 
MAMOUZELLE 
J'occuperai moi-même la chambre d'ami. 
 
TANIA 
Qu'est-ce qui a bien pu vous faire changer d'avis subitement ?  
 
MAMOUZELLE 
Il se trouve que la chambre d'ami donne sur le palier de la chambre voisine de Christophe Rodolphe Charles Henri et j'en passe.  
 
TANIA 
Qui donc ? 
 
MAMOUZELLE 
Je veux parler de monsieur le Comte. 
 
TANIA 
Monsieur le Comte ? Ah ! mais bien sûr ! Que suis-je bête ! Oh, mais rassurez-vous, avec ce qu'il vient de subir, l’idiot, je doute fort qu'il revienne une seconde fois à la charge ! ? 
 
MAMOUZELLE 
Je préfère rester prudente. 
 
TANIA 
C'est comme il vous plairai ma chère. 
 
MAMOUZELLE, se parlant à elle même 
Il en met du temps pour faire chauffer le café. 
 
TANIA 
Encore un problème, Mamouzelle ? 
 
AUGUSTIN, sort de la cuisine au même moment 
Le café est prêt, Mesdames ! Je ne fus pas trop long ? 
 
MAMOUZELLE 
Nous commencions à nous impatienter, toutes les deux. Les tasses se trouvent derrière le bar. 
 
 
TANIA 
Venez vous asseoir à mes coté, Mamouzelle, nous avons la chance d'avoir quelqu'un pour nous faire le service aujourd'hui. 
 
MAMOUZELLE 
Ca n'arrive pas tous les jours. 
 
TANIA 
Un homme qui fait le service, n1est-ce pas original ? 
 
MAMOUZELLE 
Je vais pouvoir me reposer un peu. 
 
TANIA 
Vous en avez sans doute grand besoin. 
 
MAMOUZELLE 
Depuis que ces messieurs sont arrivés, je n'ai plus une seule minute à moi. 
 
TANIA 
A une époque, il en fut tout autant pour moi. 
 
MAMOUZELLE 
Tiens ? Depuis quand avez-vous été au petit soin de trois messieurs ? 
 
TANIA 
C'est à dire qu'il en représentait trois à lui tout seul.  
 
AUGUSTIN 
Ces dames sont servies ! 
 
MAMOUZELLE 
Vous pouvez disposer mon ami. 
 
TANIA 
Monsieur Augustin prendra bien le café en notre compagnie ?  
 
MAMOUZELLE 
C'est à dire que monsieur Roberto le réclame dans sa chambre.  
 
AUGUSTIN 
Roberto attendra. 
 
MAMOUZELLE 
Je ne le crois pas. 
 
AUGUSTIN 
Très bien, j'y cours ! A plus tard, Tania ! 
 
MAMOUZELLE 
Voyons, Augustin, ne faites pas attendre Roberto ! 
 
(Augustin disparaît aussitôt dans les chambres)  
TANIA 
Monsieur Augustin est vraiment charmant ! 
 
MAMOUZELLE 
Alors, comme ça, votre mari en représentait trois ! ? 
 
TANIA 
II me donnait beaucoup de fil à retordre. 
 
MAMOUZELLE 
Vous avez définitivement définitivement rompu avec ? 
 
TANIA 
Nos rapports devenaient trop difficiles au bout de deux ans de vie maritale. 
 
MAMOUZELLE 
Ce n'était pas quatre ans la fois passée ? 
 
TANIA 
Vous voulez parler de mon premier mariage...que je préfére, d'ailleurs, oublier à tout jamais ! 
 
MAMOUZELLE 
Décidément, vous et les hommes, ce n’est pas trop la réussite !  
 
TANIA 
Je garde encore l'espoir; j'ai encore de belles années devant moi pour trouver le véritable compagnon de ma vie. 
 
MAMOUZELLE 
Vous ne le rencontrerez pas dans' ce trou perdu. 
 
TANIA 
Qui sait ? 
 
MAMOUZELLE 
Vous ferez sa rencontre dans la capitale. 
 
TANIA 
Pour rien au monde je n'y retournerais. 
 
MAMOUZELLE 
Dans ce cas, où comptez-vous aller ? 
 
TANIA 
Dans un pays lointain...vers de chaudes contrées...  
 
MAMOUZELLE 
Vous recherchez l'exotisme ? 
 
TANIA 
En quelque sorte. 
 
MAMOUZELLE 
Mais pour l'heure, je vais vous accompagner dans votre chambre.  
 
TANIA 
Il est vrai que j'ai besoin d'un peu de repos...après ce long voyage.  
 
MAMOUZELLE 
Suivez-moi ! 
 
(Elles quittent les lieux)  
 
 
 
FIN DE LA SCENE 1 
 
 
----------- 
 
 
ACTE 2 1 SCENE 2 
 
AUGUSTIN, ROBERTO, MAMOUZELLE 
 
 
ROBERTO 
Je quitte cette auberge sur le champ ! 
 
AUGUSTIN 
Que se passe-t-il, Roberto ? Où comptes-tu aller, enfin ?  
 
ROBERTO 
Je vais fuir ce pays à tout jamais. 
 
AUGUSTIN 
Quelle drôle d'idée est-ce là ! ? 
 
 
EOBERTO, à lui-même 
« ...Peut-être un soir m'attend 
Où je boirai tranquille. 
En quelque vieille ville 
Et mourrai plus content: 
Puisque je suis patient !... » 
 
 
AUGUSTIN 
Tu es bien sombre, tout à coup. 
 
EOBERTO, à lui-même 
¬« Si mon mal se résigne,  
Si jamais quelque or 
Choisirai-je le Nord  
Ou le pays des vignes ?...  
Ah ! Songer est indigne » 
 
AUGUSTIN 
Ressaisis-toi, mon ami ! 
 
ROBERTO, à lui-même 
« Puisque c'est pure perte !  
Et je redeviens  
Le voyageur ancien, 
Jamais l'auberge verte  
Ne peut bien m'être ouverte... » 
Arthur Rimbaud (Le pauvre songe) 
 
AUGUSTIN 
Laisse tomber, voyons ! La fuite n'est pas une bonne solution en soi.  
 
ROBERTO 
Toi aussi, tu me traîtes de fuyard. J'en ai assez ! 
 
 
AUGUSTIN 
Désolé, je ne voulais pas t'offenser. 
 
ROBERTO 
Et l'exil, ce n'est pas une forme de fuite( me diras-tu ?  
 
AUGUSTIN 
Où veux-tu en venir ? 
 
ROBERTO 
Tu sais très bien ce que j'entends par là. 
 
AUGUSTIN 
Pas vraiment. 
 
ROBERTO 
Pour quelqu'un qui a passé la- majeure partie de sa vie en exil, « pas vraiment » me semble plutôt étrange comme réponse. 
 
AUGUSTIN 
Que veux-tu que je te confesse, la vie est faite ainsi. Et puis, de toutes façons, j'ai fait ce que j'ai pu. 
 
AUGUSTIN 
« Je suis venu calme orphelin, riche de mes seuls yeux tranquilles,  
Vers les hommes des grandes villes: ils ne m'ont pas trouvé malin.  
A vingt ans un trouble nouveau, sous le nom d'amoureuse flamme,  
M'a fait trouvé belle les femmes. Elles ne m'ont pas trouvé beau.  
Bien que sans patrie et sans Roi et très brave ne l'étant guère,  
J'ai voulu mourir à la guerre: La mort n'a pas voulu de moi. »  
Paul Verlaine (Gaspard Hauser) 
 
ROBERTO 
Et dès lors, te voilà en exile. 
 
AUGUSTIN¬ 
« Suis-je né trop tôt ou trop tard ? 
Qu'est-ce que je fais en ce monde ? » 
Paul Verlaine (Gaspard Hauser - suite) 
 
MAMOUZELLE 
A table !  
 
ROBERTO 
Non merci, je n'ai pas faim ! 
 
AUGUSTIN 
« 0, vous tous, ma peine est profonde: 
Priez pour le pauvre Gaspard ! » 
Paul Verlaine (Gaspard Hauser - suite et fin) 
 
(Augustin entraine Roberto dans la chambre) 
 
MAMOUZELLE 
Quelle mouche les a donc piqué, aujourd'hui ? N'oubliez pas, messieurs, notre rendez-vous poétique de ce soir ? 
 
 
FIN DE LA SCENE 2 
 
 
 
------------ 
 
 
ACTE 1 / SCENE 3 
 
AUGUSTIN, ROBERTO, MAMOUZELLE 
 
 
 
MAMOUZELLE 
« Ce soir se manifestera l'Amour ! 
Depuis longtemps je l'attends, je le guette ! 
Viendra le poète pour me faire la cour, 
Puis viendra mon tour de lui faire sa fête. 
Je lui offrirai mes plus beaux atours; 
Aussi je doute qu'il ne soit assez bête 
pour ne pas se glisser dans mes draps de velours. »  
 
MAMOUZELLE, toujours 
Je vois que ces messieurs ne sont pas présents dans la grande salle. Auraient-ils oublié notre rendez-vous ? A quoi bon créer des poèmes ceux-ci ne viennent pas les entendre ? Il est préférable que j'aille me coucher. 
 
EOBERTO¬ 
« L'hiver, nous irons dans un petit wagon rose 
Avec des coussins bleu. 
Nous serons bien. 
Un nid de baisers fous repose 
Dans chaque coin moelleux. 
Tu fermeras l'œil, pour ne point voir, par la glacer 
Grimacer les ombres des soirs, 
Ces monstruosités hargneuses, populace 
De démons noirs et de loups noirs. 
Puis tu te sentiras la joue égratignée... 
Un petit baiser, comme une folle araignée, 
Te courra par le cou... 
Et tu me diras « cherche ! » en inclinant la tête, 
Et nous prendrons du temps à trouver cette bête, 
Qui voyage beaucoup... 
Arthur Rimbaud (Rêve pour l'hiver)  
 
MAMOUZELLE 
En voila tout de même un qui a répondu à l'appel.  
 
ROBERTO 
Bonsoir Mamouze11e ! 
 
MAMOUZELLE 
Monsieur Augustin n'est pas avec vous ? 
 
ROBERTO 
J'allais vous poser la même question.  
 
MAMOUZELLE 
Manquerait-il à sa parole ? 
 
ROBERTO 
Augustin n'est point homme à manquer parole.  
 
MAMOUZELLE 
Depuis que ses yeux se sont posés sur e11e, il n'est plus le même homme. 
 
ROBERTO 
Vous avez le béguin pour lui, ces temps-ci, c'est bien cela ? 
 
MAMOUZELLE 
Ai-je l'air d'une femme amoureuse ? 
 
ROBERTO 
En tous cas, vous en présentez les symptômes. 
 
AUGUSTIN 
Ah ! Comme je vous retrouve, mes amis. 
 
MAMOUZELLE 
C'est à cette heure-ci que vous arrivez ? 
 
ROBERTO 
Nous te croyons disparu. 
 
AUGUSTIN 
Quelle drôle d'idée est-ce là ! Mais où allez-vous, Mamouzelle ?  
 
MAMOUZELLE 
Je vais me coucher. 
 
AUGUSTIN 
Je vous en prie, restez ! La soirée ne fait que commencer; nous allons faire quelque vers. 
 
ROBERTO 
A ta place, je n'insisterai pas. 
 
MAMOUZELLE 
Quelle mouche l'a donc piquée ? Elle n'est plus la même avec moi depuis quelques temps; on dirait même qu'elle feint de m'ignorer.  
 
ROBERTO 
C'est plutôt quoi qui semble ne plus la considérer. 
 
AUGUSTIN 
Que me contes-tu là ? Mamouzelle est une personne pour qui j'ai une grande et infinie affection. 
 
ROBERTO 
Je crains qu'elle n'en soit persuadée. 
 
AUGUSTIN 
Que sais-tu au juste ? 
 
 
ROBERTO 
Pas grand chose, à vrai dire...si ce n'est beaucoup pour bien comprendre. Mais dis-moi, cher maître, elle aussi semble te vouer une grande  
affection ! ? Comment as-tu fait sa connaissance ? 
 
AUGUSTIN 
J'ai fait sa connaissance au printemps dernier. Je venais de parcourir à l'époque des dizaines de kilomètres à pied; j'étais très fatigué et je ne savais où aller. En chemin, l'Auberge de la Licorne se présenta devant moi. Dès lors, me voilà comblé par son charme ! 
 
ROBERTO 
Dis, Augustin, cela ne s'appellerait-il pas l'Amour ?  
 
AUGUSTIN 
Ton esprit est toujours aussi vif, Compagnon. 
 
ROBERTO 
Autrement dit, tu m'as fait venir à l'auberge de la Licorne pour que j'assiste à tes fiançailles. 
 
AUGUSTIN 
En quelque sorte. 
 
ROBERTO 
Eh bien, je suis très honoré d'y participer. D'autant que j'apprécie beaucoup l'élue de ton coeur; ton choix est parfait ! 
 
AUGUSTIN 
Seulement voilà, quelque chose ne tourne pas rond ces jours-ci.  
 
ROBERTO 
Tu n'aurais pas remarqué quelqu'un d'autre en dehors de Mamouzelle ? 
 
AUGUSTIN 
Non. 
 
ROBERTO 
En es-tu certain ?  
 
AUGUSTIN 
C’était donc cela ! 
 
ROBERTO 
Je crois bien. 
 
AUGUSTIN 
Tout ça parce que j’ai souhaité la bienvenue à son amie Tania, ce matin, en termes poétiques. 
 
ROBERTO 
La façon dont tu t'y es pris pour la saluer n'aura sans doute pas plu à Mamouzelle. 
 
 
FIN DE LA SCENE 3 
 
 
----------- 
 
 
ACTE 1 / SCENE 4 
 
 
TANIA DESPINS, AUGUSTIN, ROBERTO,  
MAMOUZELLE, LE COMTE 
 
TANIA, surgit 
Ces Messieurs sont en pleine composition, dirait-on ? Bonsoir !  
 
AUGUSTIN 
Belle soirée d'Automne, ne trouvez-vous pas ? 
 
TANIA 
Idéale pour les promenades romantiques. 
 
ROBERTO 
Il est préférable que j'aille me coucher. 
 
AUGUSTIN 
Un instant, Roberto, je voudrais te présenter à Tania. Attends, voyons ! 
 
TANIA 
Laissez-le donc s'enfuir, Augustin. 
 
AUGUSTIN 
Qu'est-ce qui lui prend ?  
 
TANIA 
Votre ami et moi avons déja fait connaissance, et cela n'a pas été la franche sympathie entre nous; il s'est d'ailleurs montré distant à mon égard.  
 
AUGUSTIN 
Cela ne lui ressemble pas. 
 
 
TANIA 
Il fait parti de ces gens qui ont l'habitude de fuir la patrie.  
 
AUGUSTIN 
Comment cela ? 
 
TANIA 
C'est, du moins, ce qui m'a semblé. 

AUGUSTIN 
Roberto n'est point un lâche fuyard comme vous semblez en être convaincue; Certes, il aime l'imprévu, mais il adore par-dessus tout le contact avec ses semblables. 
 
TANIA 
Vous m'apprenez bien des choses à son sujet. 
 
MAMOUZELLE 
Belle soirée d'Automne, n'est-ce pas ? 
 
TANIA 
Bonsoir Mamouzelle ! 
 
MAMOUZELLE 
Je ne vous dérange pas au moins ? 
 
AUGUSTIN 
Pas du tout. Venez vous joindre à nous ! 
 
MAMOUZELLE 
Etes-vous certains que je ne serai pas de trop ? 
 
AUGUSTIN 
Vous êtes ici chez vous, l'auriez-vous oublié ? 
 
MAMOUZELLE 
Dans ce cas, je vous prépare une infusion ? 
 
TANIA 
Très volontiers, Mamouzelle ! 
 
AUGUSTIN 
Non merci. Je vais me coucher. Bonsoir Mesdames !  
 
MAMOUZELLE 
Faites de beaux rêves, Augustin ! 
 
(Augustin quitte rapidement les lieux) 
 
TANIA 
Dites, Mamouzelle, monsieur le Comte va mieux ? S'est-il remis ?  
 
MAMOUZELLE 
Ca peut aller. 
 
TANIA 
Navrée de m'être laissée emporter de la sorte. 
 
MAMOUZELLE 
Vous êtes trop impulsive, ma chère Tania; la prochaine fois vous vous contrôlerez d'avantage. 
 
TANIA 
Vous admettrez tout de même qu'ils ont un comportement étrange vos amis poètes. L'un est fuyard et l'autre provocateur; seul le troisième sait se montrer des plus sociables et des plus délicat à mon endroit. 
 
 
 
MAMOUZELLE 
Ne vous y fier pas trop, tout de même; les poètes, moi je les connais bien, ils ont leur zone d'ombre: un jour grave et profond, et le lendemain, plus légers que la plume au vent, toujours prêts à suivre la première hirondelle  
qui passe. 
 
TANIA 
Vous êtes aussi impitoyable que moi dans vos jugements.  
 
MAMOUZELLE 
En ce qui concerne monsieur Augustin, je n'ai l'ombre d'un doute.  
 
TANIA 
Cependant il ne vous laisse insensible. Viendra le jour où vous ne pourrez  
plus résister devant ses marques d'intentions. 
 
MAMOUZELLE 
Qu'il patiente un peu; nous autres, femmes, devons préserver notre mystères: les voies de l'Amour sont parfois tortueuses. Il est des passions  
qui sont nées à la suite de confrontations violentes. 
 
TANIA 
Vous ne songez tout de même pas à ma première rencontre avec monsieur le comte. 
 
MAMOUZELLE 
Qui sait ? 
 
TANIA 
Impossible ! Je le trouve trop prétentieux. 
 
LE COMTE, arrive 
« Le poète n’a pas toujours sa tête lorsqu’il s’entête à rechercher le bonheur absolu. Il n’a d’autre but que sa quête, et les tempêtes rencontrées par ailleurs ne le tuent. Si ce n’est que Madame la chouette sur la branchette, la nuit tombée, Haut-le-Coeur s’évertue. Ou bien encore la mouette qui fête sur le mat d’un voilier son amour éperdu. » 
 
 
MAMOUZELLE 
Monsieur le Comte est plein d'inspiration, ce soir. 
 
LE COMTE 
Augustin m'a proposé de me joindre à vous pour la soirée poétique.  
 
MAMOUZELLE 
Trop tard, mon ami, ces messieurs sont allés se coucher. Mais je peux toujours vous proposer une infusion de menthe et de thym. 
 
LE COMTE 
Non merci; je ne voudrais pas vous importuner. Et puis, je ne tiens pas non plus finir mes jours invalides, comprenez-vous ? 
 
TANIA 
Je tiens à vous faire toutes mes excuses pour ce matin, Christophe 
Rodolphe Charles Henri; je suis navrée de m'être emportée de la sorte. 
 
LE COMTE 
Je reconnais que je vous ai provoqué un petit peu; c'est pourquoi je tiens moi aussi à vous faire mes excuses ! (Il lui fait le baisemain) 
 
(Mamouzelle quitte les lieux) 
 
TANIA 
Asseyez-vous, Charles Henri et j'en passe ! 
 
(Le Comte s'assoit) 
TANIA 
Alors, comme cela, vous êtes en vacances dans le midi de la France ? !  
 
LE COMTE 
A vrai dire, je suis en convalescence. 
 
TANIA 
Comment trouvez-vous la région ? 
 
LE COMTE 
J'y viens régulièrement depuis ma plus tendre enfance; je la trouve beaucoup plus calme et ensoleillée que notre capitale. 
 
TANIA 
C'est pour cette raison que je suis venue ici. 
 
TANIA 
Je compte ensuite faire un long voyage vers un pays inconnu. 
 
LE COMTE 
Ah oui ! et où cela ? 
 
TANIA 
J'hésite entre le Maghreb, l'Asie et les îles du pacifique. 
 
LE COMTE 
Ah, l'exotisme ! il n'y a rien que cela de vrai. 
 
TANIA 
J'aspire au dépaysement complet. 
 
LE COMTE 
J'en conviens. Mais dites-moi, très chère, vous comptez y aller seule ? 
 
TANIA 
C'est un projet que j'ai conçu en solitaire. 
 
LE COMTE 
Vous n'avez peur de rien, à ce que je vois. 
 
TANIA 
N'oubliez pas que je sais me défendre. 
 
LE COMTE 
Je vous fais confiance. 
 
TANIA 
Nous reparlerons de tout cela une autre fois si vous le voulez bien.(Elle se lève) 
 
 
LE COMTE 
Et pourquoi pas demain. Qu'en dites-vous ? 
 
TANIA 
Avec plaisir, Charles ! 
 
LE COMTE 
Tiens ! que diriez-vous d1un pique-nique ? Je connais un endroit particulièrement agréable pour ce genre de loisir. 
 
TANIA 
Bonne nuit, Charles Henri René et j'en passe ! 
 
LE COMTE 
Bonne nuit, Tania ! (Puis) Eh bien, La soirée fut excellente, si je puis dire. 
(Il quitte les lieux peu près) 
 
 
FIN DE LA SCENE 4 
 
 
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ACTE 1 / SCENE 5 
 
AUGUSTIN, MAMOUZELLE 
 
AUGUSTIN 
Voyons voir s'il reste de l'infusion ! (Il disparaît dans la cuisine) 
 
MAMOUZELLE, surgit de la chambre à son tour 
Voyons voir s'il reste de l'infusion. (Elle rentre dans la cuisine, puis en ressort aussitôt) Tout compte fait, je vais me coucher. 
 
AUGUSTIN 
Un instant, Mamouzelle ! 
 
MAMOUZELLE 
Je suis fatiguée, Augustin. 
 
AUGUSTIN 
Vous faites tout pour m'éviter, ces jours-ci. 
 
MAMOUZELLE 
Désolée, je ne comprends pas... ? 
 
AUGUSTIN 
Vous comprenez parfaitement. 
 
MAMOUZELLE 
Bonne nuit, Augustin ! 
 
AUGUSTIN 
Bonne nuit. Décidément, il n'y a plus moyen de lui parler; elle fait la sourde oreille. Comment pourrais-je lui faire entendre raison ? 
(Il fait le va et vient pendant quelques secondes, tout en s'interrogeant) Il le faut pourtant ! (Il marmonne entre ses dents, puis...) 
 
AYGUSTIN 
« Comme la voix d'un mort qui chanterait du fond de sa fosse, 
Maîtresse, entends monter vers ton retrait ma voix aigre et fausse. 
Ouvre ton âme et ton oreille au son de ma mandoline: 
Pour toi j'ai fait, pour toi, cette chanson cruelles et câline. 
Je chanterai tes yeux d'or et d'onyx purs de toutes ombres, 
Maîtresse, entends monter vers ton retrait ma voix aigre et fausse. 
Puis je louerai comme il convient cette chair bénie 
Dont le parfum opulent me revient les nuits d'insomnie. 
Et pour finir je dirai le baiser de ta lèvre rouge, 
Et la douceur à me martyriser, -Mon ange ! -ma gouge ! 
Ouvre ton âme et ton oreille au son de ma mandoline: 
Pour toi j'ai fait, pour toi, cette chanson cruelle et câline. »  
Paul Verlaine (Sérénade) 
AYGUSTIN 
Allons de ce pas prendre l'air frais de la nuit ! (Il sort) 
 
 
FIN DE LA SCENE 5 
 
 
 
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ACTE 1 / SCENE 6 
 
TANIA DESPINS, LE COMTE, MAMOUZELLE, AUGUSTIN 
Le matin… 
 
 
TANIA 
Je suis belle, ô mortels ! comme un rêve de pierre, 
Et mon sein, où chacun s lest meurtri tour à tour, 
Est fait pour inspirer au poète un amour 
Eternel et muet ainsi que la matière. 
Je trône dans l'azur comme un sphinx incompris; 
J'unis un coeur de neige à la blancheur des cygnes; 
Je hais le mouvement qui déplace les lignes, 
Et jamais je ne pleure et jamais je ne ris. 
Les poètes, devant mes grandes attitudes 
Que j'ai l'air d'emprunter aux plus fiers monuments, 
Consumeront leurs jours en d'austères études; 
Car j'ai pour fasciner ces dociles amants, 
De purs miroirs qui font toutes choses plus belles: 
Mes yeux, mes larges yeux aux clartés éternelles ! Charles Baudelaire (La beauté) LE COMTE, surgit des chambres 
Êtes-vous prête, ma chère ?  
 
TANIA 
En route pour l'Aventure ! 
 
LE COMTE  
« Ma bien-aimée,  
Je vais vous conduire, en bon chérubin 
Vers de chaudes contrées  
Où les femmes sont reines, chaussées de satins;  
Des jardins parfumés  
D'exotisme, de fruits secs, d'encens au jasmin  
Et de plats épicés,  
Nous serons servis avec les prières du matin;  
Puis dans la journée, 
Nous irons nous balader sur des plages sans fin.  
Des musiciens illuminés 
Transporteront nos âmes sur d'éternels refrains  
Mélodiques à souhait;  
Nos têtes reposeront sur d’immenses coussins  
Plus tard en 'soirée.  
Dans la nuit, nous contemplerons, main dans la main 
L'étoile de la voix lactée. »  
 
 
TANIA 
Dites donc, Charles Henri, ne devions-nous pas simplement  
pique-niquer ?  
 
LE COMTE 
Suivons les ailes de l'Amour ! Après vous, ma colombe bien-aimée !  
(Tous deux quittent les lieux rapidement) 
 
MAMOUZELLE, sort des chambres, s'assoit sur un tabouret, puis lit un message 
 
Mes amis,  
« Par les soirs bleus d'été, 
J'irai dans les sentiers,  
Picoter par les blés, fouler l'herbe menue;  
Rêveur, j'en senti rai la fraîcheur à mes pieds.  
Je laisserai le vent baigner ma tête nue.  
Je ne parlerai pas, je ne penserai rien:  
Mais l'amour infini me montera dans l'âme,  
Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien,  
Par la nature, -heureux comme avec une femme.  
Arthur Rimbaud (Sensation) 
 
(Après quoi elle, elle baille, puis s’endort) 
 
AUGUSTIN, entre 
Voici des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches 
Et puis voici mon coeur qui ne bat que pour vous, 
Ne le déchirez pas avec vos deux mains blanches 
Et qu'à vos yeux si beaux l'humble présent soit doux. 
J'arrive tout couvert encore de rosée 
Que le vent du matin vient glacer à mon front, 
Soufrez que ma fatigue à vos pieds reposée 
Rêve des chers instants qui la délasseront. 
Sur votre jeune sein laissez rouler ma tête 
Toute chaude encore de vos derniers baisers; 
Laissez-la s'apaiser de la bonne tempête 
Et que je dorme un peu puisque vous reposez. 
 
Paul Verlaine (Green - Aquarelles) 
 
(Il baise le front de Mamouzelle; celle-ci se réveille à ce moment-là) 
 
 
AUGUSTIN 
Oh, Pardon ! Je ne voulais pas troubler votre sommeil.  
 
MAMOUZELLE 
J'ai lu ce message, puis je me suis endormie; J'ai passé une nuit blanche. Oh ! quelles jolies fleurs ! Comme c'est gentil à vous !  
(Elle respire les fleurs) 
 
AUGUSTIN 
En cette saison, il est difficile d'en trouver. Je suis ravi qu'elles vous plaisent !... Il y a aussi des Amandes. 
 
MAMOUZELLE 
Comment se fait-il que vous soyez aussi matinal, Augustin ?  
 
AUGUSTIN 
Moi aussi j'avais du mal à m'endormir; alors j'en ai profité pour parcourir cette nature si riche de toutes ces couleurs mordorées. Je songeais à vous, ma chère, tandis que l 1 Aube pointait à l'Horizon...  
 
MAMOUZELLE 
Vous n'avez pas rencontré Roberto en chemin ? 
 
AUGUSTIN 
Non. 
 
MAMOUZELLE 
J'ai trouvé ce message sur son lit. 
(Elle remet le message à Augustin) 
 
AUGUSTIN, peu après avoir lu le contenu du message 
Il patinait merveilleusement, 
S'élançant capêtueusement, 
Rarivant si joliment vraiment; 
Fin comme une grande jeune fille, 
Brillant, vif et fort tel une anguille; 
Des jeux d'optiques prestigieux, 
Un tourment délicieux des yeux, 
Un éclair qui serait gracieux; 
AUGUSTIN, toujours 
Parfois, il restait comme invisible 
Vitesse en route vers une cible, 
Si lointaine elle-même invisible; 
Invisible de même aujourd'hui, 
Que sera-t-il advenu de lui ? 
Que sera-t-il advenu de lui ? 
Arthur Rimbaud 
 
MAMOUZELLE 
Vous feriez mieux de l'oublier à tout jamais. 
 
AUGUSTIN 
Ainsi soit-il ! 
 
MAMOUZELLE 
Que diriez-vous d'une infusion de menthe et de thym ?  
 
AUGUSTIN 
J'accepte avec plaisir, Mamouzelle. 
 
MAMOUZELLE 
Je m'en vais de ce pas vous la préparer. 
 
AUGUSTIN 
J'y pense !...nous devrions faire des provisions de bois pour l'hiver 
qui approche. 

MAMOUZELLE 
Votre séjour semble prendre l'allure d'une éternité ! ? Ainsi je pourrai m'initier à l'Art Poétique en votre compagnie. 
 
 
AUGUSTIN 
« Sur les notes de l'Amour  
S'écouleront nos plus beaux jours; 
Saveurs de Menthe et de thym 
Accompagneront nos doux matins ! » 
 
MAMOUZELLE 
« Comme des esclaves libres,  
Prenons le temps de vivre;  
Amitié oblige, je te serai fidèle,  
Face aux ennuis, nous resterons zen ! » 
 
AUGUSTIN 
« Positives vibrations sur les jours lointains; Pour que la Paix règne autour de soi, D'harmonieux échanges de mains Viendront saluer le bonheur devenu Roi ! » 
 
MAMOUZELLE 
Dès que la nuit tombera, 
Veillée suprême devant la cheminée; 
Et la chaleur du feu scintillera 
Sur les décibels de nos plus belles années ! 
 
AUGUSTIN et MAMOUZELLE 
« Du Champinelle et des chansons,  
Pour les amoureux de la vie,  
Les survivants de l'infini,  
Et quelques soient les saisons ! » 
 
AUGUSTIN 
« Aie donc la Foi pour compagne,  
Résiste encore au vent mauvais;  
Fais de la joie ta seule raison;  
Sur cette terre nettoie tes plaies ! » 
 
 
MAMOUZELLE 
« Laisse donc tes chagrins de coté,  
Déchire tes guenilles d'opprimé et 
Viens donc rejoindre sur la banquise  
Les âmes révoltées pour qui le soleil brille ! » 
 
AUGUSTIN 
« Dans notre galaxie terrienne  
L'argent n'est pas le seul emblème  
Capable de tout résoudre;  
Délivre-t'oi de son joug ! » 
 
MAMOUZELLE 
« Il contribuera, certes, à ton bonheur,  
Mais il n'est pas ton seul va-tout; 
Il y a aussi la voix du cœur 
Qui te donnera l'espoir en retour ! » 
 
AUGUSTIN et MAMOUZELLE 
« Du Champinelle et des chansons,  
Pour les amoureux de la vie,  
Les survivants de l'infini,  
Et quelques soient les saisons !  
 
Bénis soient les poètes !  
Les temps nouveaux nous guettent, 
La chance est de retour ! » 
 
Bénis soient les poètes !  
La vie de chacun ne s'achète, 
Elle est un trésor en nous ! »  
 
(Augustin et Marnouzelle prennent la direction des chambres) 
 
FIN DE LA SCENE 6 
 
FIN DE L’ACTE 1 
 
 
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EPILOGUE 
 
 
SYLVESTRE (Le Facteur), AUGUSTIN, MAMOUZELLE 
SYLVESTRE, surgit du jardin, portant du linge dans ses bras, suivi de Mamouzelle 
Où dois-je déposer, le linge ? 
 
MAMOUZELLE, surgit à son tour 
Sur le bar !  
 
SYLVESTRE, dépose le linge sur le  
Toutes ces histoires m'ont donné soif ! Je crois bien que c'est l'heure de  
l'apéritif ? ! Vous permettez que... 
 
MAMOUZELLE 
Mais alors, vite fait, Facteur ! 
 
SYLVESTRE 
Je vous sers un verre de Champinelle ? 
 
MAMOUZELLE 
Non merci. 
 
SYLVESTRE 
Vous ne voulez pas trinquer avec moi ? 
 
MAMOUZELLE 
Dépêchez-vous, Sylvestre ! 
 
SYLVESTRE 
Il n'y a pas le feu à l'Auberge. 
 
MAMOUZELLE 
Je voudrais rester seule. 
 
SYLVESTRE 
Comment ? ma compagnie vous déplait-elle ? 
 
AUGUSTIN, entre dans l’auberge 
Laissez-nous seuls, Sylvestre !  
 
SYLVESTRE 
Monsieur Augustin ! Quel bon vent vous amène ? 
 
MAMOUZELLE 
Comment va mon cher mari ? 
 
AUGUSTIN 
A merveille ! J'ai pu remettre mes idées en place.  
 
MAMOUZELLE 
A présent, passons à table ! Monsieur Sylvestre, vous ferez-nous  
l'honneur de partager notre repas ? 
 
SYLVESTRE 
C'est à dire qui il me faut achever ma tournée matinale...  
 
MAMOUZELLE 
Comment ? Vous ne voulez pas goutter à ma soupe de poireaux à la sauce de courgettes ! 
 
SYLVESTRE 
Votre quoi ? 
 
MAMOUZELLE 
Il s'agit d'une recette que maman m'a apprise il y a fort longtemps. (Elle prend la direction de la cuisine, suivie de Sylvestre) 
 
AUGUSTIN 
« Bénis soient les poètes ! 
Les temps nous guettent, 
La chance est de retour ! » 
 
AUGUSTIN, toujours 
Et si j'allais chercher d'autres bouteilles à la cave ? ! 
 
FIN DE L’EPILOGUE 
 
 
FIN DU 9ième EPISODE 
 
Affaire à suivre dans le 10ième épisode intitulé :  
« BRANLE-BAS AU CHÂTEAU » 
 
 
 
 
 
 
 
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