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LES ROIS DE L'AZUR et LE DELUGE
CLIQUEZ SUR LE LIEN OU LA PHOTO CI-DESSUS ET DECOUVREZ L'EPISODE 48 avec des illustrations :
Titre : LES AVENTURES FANTASTIQUES DE ROBERTO
Dans
« Les Rois de l’Azur »
48ième Episode
Personnages :
ROBERTO (Ecrivain - Aventurier)
MISS MARYL (citoyenne de la terre)
LE COMTE DE LA BOUCHE-EN-BIAIS
SYLVESTRE (Ex facteur dans le Midi de la France)
NICKI (le pêcheur inuit)
L' ALBATROS
LE BELOUGA (Grand cétacé marin)
LIEU : L'action se déroule sur un morceau de banquise à la dérive, quelque part dans la mer de Beaufort située dans l'Océan Arctique.
GENRE : comédie
EPISODE 48 : «LES ROIS DE L'AZUR» (2002) (Pièce illustrée)
Première partie de la pièce du même titre « Les rois de l'azur» (7 pers)
AUTEUR : Emilien CASALI
Auteur: Emilien Casali
PROTECTION SACD (Société des Auteurs Compositeurs Dramatiques) - dépôt d'enregistrement
Contact : Emilien CASALI– (France)
e-mail : casali-emilien1@orange.fr
PROLOGUE
LE COMTE DE LA BOUCHE-EN-BIAIS, NICKI (le pêcheur Inuit)
L’histoire débute sur la banquise, près du port d’lnuvik, petite localité au Nord Ouest du Canada, près de la mer de Beaufort. Nous sommes en soirée; le temps est brumeux. Un albatros surgit des airs et se pose sur la banquise...
L’ALBATROS, fait quelque pas sur la glace, regarde derrière lui, à droite et à gauche, puis fait un monologue
« Cette nuit, au-dessus des quais silencieux,
Plane un calme lugubre et glacial d'automne.
Nul vent. Les becs de gaz en fil monotone
Luisent au fond de leur halo, comme des yeux.
Et, dans l’air ouaté de brume, nos voix sourdes
Ont le son des échos qui se meurent, tandis
Que nous allons rêveusement, tout engourdis
Dans l’horreur du soir froid plein de tristesse lourde.
Comme un flux de métal épais, le fleuve noir
Fait sous le ciel sans lune un clapotis de vagues.
Et maintenant, empli de somnolences vagues,
Je sombre dans un grand et morne nonchaloir. »
Ephraim MIKHAEL (Chant d'automne)
Puis l’Albatros s'envole dans les airs…
Peu après Nicki apparaît au loin muni d'une lanterne; il est suivi de Monsieur le Comte, la démarche chancelante; ce dernier porte un peignoir sur lui, une canne à pêche dans une main et dans l'autre une bouteille de Whisky.
LE COMTE, arrive en chantant
« Oyez, oyez, belle, belle dame ! Le temps est venu de se quitter, sans verser une seule larme et sans un seul regret ! Adieu, ma belle hirondelle ! Adieu, ma belle hirondelle ! Je mien suis allé soigner mes blessures sur la banquise quelque part au Pôle Nord...Je m'en suis allé consoler ma muse sur la banquise quelque en terre Inuit ! Adieu, ma belle hirondelle ! Adieu, ma belle hirondelle ! Lala lala lala lala ! Lalalalala ! »
NICKI
Voyez-vous, M’sieur le Comte, tous les ans, à la même époque, la banquise se forme sur le bord de la côte Nord Ouest Canadienne; alors, surpris par ce phénomène, les bateaux de pêche restent bloqués dans la glace pendant six mois.
LE COMTE
Dis-moi, mon garçon, c'est encore loin ?
NICKI
Encore quelques mètres, M’sieur le Comte.
LE COMTE
Mais où va-t-on au juste ?
NICKI
Je vous l'ai déjà dit, c'est au bord de la banquise que se pêche le poisson; désolé, on n’a pas le choix... on doit s'y rendre.
LE COMTE
J'espère que la glace est solide... qu'elle tiendra bon !?
NICKI
Ca y est ! Nous y sommes, M’sieur l'Comte. Face à vous se trouve la mer du Beaufort ! Maintenant, allez-y à votre guise, lancez votre ligne.
LE COMTE, se rince le gosier avec sa bouteille de Whisky
C'est vraiment grandiose ce qui m'arrive, Nicki !
NICKI
Qu'est-ce qui est grandiose, M’sieur le Comte ?
LE COMTE
Regarde, je marche sur la mer ! ! Je danse sur la mer ! Je cours sur la mer! N'est-ce pas merveilleux ? Enfin, je ressuscite !
NICKI
Monsieur le Comte a retrouvé sa joie de vivre, dirait-on ? !
LE COMTE
Je me sens libre en terre Inuit.
NICKI
Ici, vous aurez vite fait de l'oublier votre ex-fiancée.
LE COMTE
Lucie n'est plus qu'un lointain souvenir, mon p'tit gars. Qu'elle aille au diable, à présent ! (Il lui tend la bouteille) Tiens, à ton tour de trinquer. (Il s'assoit au bord de la banquise) Et maintenant, si nous faisions une partie de pêche ? Hein ? Qu'en dis-tu, Nicki ?
NICKI, pose sa lanterne et s'assoit à coté du Comte
Très bonne idée, M’sieur le Comte !
(Il se rince le gosier avec le Whisky)
LE COMTE
Attention ! C'est parti ! (Il lance sa ligne dans l'eau) Tu vas voir ce que tu vas voir, mon coco !
NICKI
Je vous préviens, M’sieur le Comte, on pêche le gros, par ici..
LE COMTE
Crois-moi, ce n'est pas une petite truite de rien du tout qui va m'impressionner. (Il lui passe la canne à pêche ensuite) Tiens ! à toi de prendre les commandes... (Puis il se saisit de la bouteille) Tu permets...
Soudain, la glace se brise...
LE COMTE
Ah ! je crois bien qu'on a fait une touche !?
NICKI
Je crois plutôt que c'est la glace qui se brise.
LE COMTE
Allons bon, que me chantes-tu là ?
NICKI
Je vous préviens, il arrive parfois que la banquise se casse en plusieurs morceaux, et qu'ensuite, attirés par des courants magnétiques, ceux-ci partent à la dérive.
LE COMTE
Et où les courants magnétiques les mènent-ils ?
NICKI
Ils vont se perdre dans un gouffre, quelque part au beau milieu de l'Océan Arctique.
Pendant ce temps-là, le morceau de banquise sur lequel nos deux hommes reposent se détache de la partie intégrale et prend petit à petit le large...
LE COMTE
Ce doit être magnifique l'Océan Arctique ?!
NICKI
C'est en plein Pôle Nord. Mon grand-père prétendait que le centre du monde se trouvait là-bas… je n'ai jamais vérifié.
LE COMTE
Dis-moi, mon garçon, c'est normal qu'on s'éloigne de la côte ? Je n'aperçois plus le port.
NICKI
Ce n'est qu'un effet d'optique, M’sieur le Comte.
LE COMTE, se met à bailler
C'est sûrement ça !
Le morceau de banquise sur lequel nos deux hommes reposent s'écarte de la côte et part à la dérive sans qu'ils le remarquent; puis le Comte s'endort.
Nicki plante la canne à pêche dans la glace, sort une pipe de sa poche et l'allume...
FIN DU PROLOGUE
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ACTE 1 / SCENE 1
LE COMTE DE LA BOUCHE-EN-BIAIS, NICKI (le pêcheur Inuit)
Quelques heures plus tard... Le jour se lève sur le chant mélodieux des bélougas (Gros cétacés marins); le Comte est toujours endormi.
Le morceau de banquise a quitté la côte dans la nuit et a pris le large.
Nicki continue de pêcher, la pipe à la bouche...
LE COMTE, se réveille
Nom d'une pipe ! C'est quoi tout ce vacarme ? J'aimerais bien dormir, moi.
NICKI
C'est le chant mélodieux des bélougas, M’sieur le Comte, qui accompagne en fanfare le lever du jour.
LE COMTE
Ces grosses bestioles hideuses feraient mieux de la mettre en veilleuse, sans quoi je les mets en charpie et j'en fais du boudin. C'est moi qui vous le dis ! (Il se lève en titubant) Bon sang ! Quel mal de crâne.
NICKI, lui tend la bouteille
Une petite gorgée de Whisky vous remettra d'aplomb, M’sieur le Comte ?
LE COMTE, se saisit de la bouteille
Très volontiers.
Les bélugas cessent de chanter
NICKI, tient la canne à pêche
Ca y est ! Nos chers amis se sont tus ! Nous allons pouvoir profiter du calme plat, à présent.
LE COMTE
La fanfare et moi, ça fait vraiment deux.
NICKI
Belle matinée, n'est-ce pas ?
LE COMTE
Alors, la pêche a été bonne, mon petit gars ?
NICKI
Pas terrible ! On va devoir rentrer bredouille au village.
LE COMTE, à lui-même
Tiens ! Mais l'on dirait que ça bouge lଠdessous ?
NICKI
Cet endroit est charmant en plein jour. Vous ne trouvez pas M’sieur le Comte ?
LE COMTE, regarde autour de lui
C'est curieux, je n'aperçois plus la côte.
NICKI, la pipe à la bouche
Ce n'est qu'un effet d'optique, M’sieur le Comte.
LE COMTE
Un effet d'optique, un effet d'optique ! Tu te fous de moi ou quoi ? Où sommes-nous exactement ?
NICKI, regarde autour de lui
Je crois bien qu'on est parti à la dérive, M’sieur le Comte ! ?
LE COMTE
J'ai mal entendu. Tu veux bien répéter ?
NICKI
Disons que c'est une certitude.
LE COMTE, lui tire l'oreille
Espèce d'abruti ! C'est seulement maintenant que tu t'en aperçois. Tu aurais pu me prévenir, enfin ! Que va-t-on devenir ?
NICKI
Je ne voulais pas vous déranger dans votre sommeil, M’sieur le Comte.
LE COMTE
Oh, mon dieu ! Qu'allons-nous devenir ? Nous voilà perdu au milieu de l'Océan. (Il s'agenouille et implore le ciel) Je ne veux pas mourir, Seigneur, je ne veux pas mourir ! Aidez-moi, je vous en supplie !
NICKI
Quand j'étais petit, mon grand-père me disait toujours : si jamais tu te perds en mer avec ton embarcation, fiston, la première chose à faire, vois-tu, c'est de ne pas paniquer. Conserve ton calme et laisse les flots de l'Océan te transporter. Si ton sort est de vivre, les flots te mèneront jusqu'au rivage, mais en revanche, s'il est de mourir, alors les flots t'entraîneront au naufrage.
LE COMTE, toujours à genou
Je ne veux pas finir dans un gouffre ! Je vous en supplie, Seigneur, sauvez-moi ! ! Et je vous jure qu'ensuite, je ferai don d'un rein à la banque. A l'aide, Seigneur tout puissant ! A l'aide ! A l'aide ! ! !
Puis le vombissement du moteur d'un hélicoptère se fait entendre au loin
LE COMTE, embrasse le sol
Merci, mon bon Seigneur ! Merci, mon bon Seigneur ! (Il se lève ensuite et fait de grand geste) Ohé ! Ohé ! Ohé ! C'est moi, c'est moi, je suis là ! Au secours ! Au secours ! (Puis) Ca y est, petit, nous sommes sauvés, l'hélicoptère nous a repéré; il vient dans notre direction.
Ohé ! Ohé ! Ohé !
L'hélicoptère s'écrase dans la mer...
FIN DE LA SCENE 1
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ACTE 1 / SCENE 2
LE COMTE, NICKI, MISS MARYL, ROBERTO
LE COMTE
Nom d'une pipe, l'hélico s'est écrasé ! Comment est-ce possible ? (Il s'agenouille) Je suis vraiment le plus malchanceux des hommes. Me voilà condamné à dériver au milieu des flots sur ce morceau de banquise. (Il implore le ciel) « Oh, Seigneur ! Ouvrez-moi les portes de la nuit afin que je m'en aille et que je disparaisse »
ROBERTO, arrive à la nage avec Miss Maryl
« Adieu ! Je crois qu'en cette vie je ne te reverrai jamais. Dieu passe, il t'appelle et m'oublie; en te perdant je sens que je t'aimais » (Il reste dans l'eau)
LE COMTE
« Que sont mes amis devenus, que j'avais de si près tenus et tant aimés »
MISS MARYL, reste dans l'eau
« J'entends dans le lointain des cris prolongés de la douleur la plus poignante »
ROBERTO
« Sois sage, oh ma Douleur, et tiens-toi plus tranquille »
LE COMTE
Qui va là ?
ROBERTO, toujours dans l'eau
Auriez-vous l'amabilité de bien vouloir nous secourir, mon brave Seigneur.
LE COMTE
Qui êtes-vous ? Où êtes-vous ?
ROBERTO, sort de l'eau
Nous sommes là !
MISS MARYL, sort de l'eau
Notre hélicoptère s'est scratché, mon ami.
ROBERTO
Sa Majesté peut-elle nous offrir l'asile sur sa banquise ?
LE COMTE
C'est à dire que...
MISS MARYL
Désolés de devoir nous présenter ainsi vêtu, mon brave.
ROBERTO
Où peut-on faire sécher notre linge, Monsieur le Comte ?
MISS MARYL
Pourriez-vous m'indiquer la salle de bain, Monsieur le Comte ?
LE COMTE
On se connait tous les trois ?
ROBERTO
Christophe-Rodolphe-David-Charles-Henri-René-Christian¬-Bernard-Ange de la Bouche-en-Biais, Comte de maison-du-Bois Doré, je suppose ?
LE COMTE
Rares sont ceux qui soient capables de prononcer aussi correctement tous mes patronymes, et qui plus est, dans l'ordre baptismal.
ROBERTO
Merci pour votre hospitalité, mon ami.
LE COMTE
Serait-ce vous, Roberto, le célèbre dramaturge des temps nouveaux ?
ROBERTO
En plein dans le mille, Majesté ! Et voici Miss Maryl que je ne vous présente plus, d'ailleurs.
LE COMTE
Notre cher baladin ne peut plus se passer de sa "colle Glue", dirait-on ! ? Et peut-on savoir ce que vous faites ici, mes amis ?
MISS MARYL
Je me posais la même question à votre sujet, Christophe Rodolphe j'en passe et des meilleurs.
LE COMTE
cela ne se voit pas ? Je suis à la dérive, ces temps-ci; je me laisse porter par les flots.
MISS MARYL
Cornment se fait-il que Lucie ne soit pas du voyage ?
LE COMTE
Je vous interdis de citer le prénom de cette garce en ma présence.
MISS MARYL
Alors, comme ça, votre fiancée vous a quitté ?
LE COMTE
II suffit !
ROBERTO
Monsieur le Comte ne transporte plus sa canne avec lui ?
LE COMTE
C'est vrai...où est-elle passée ?
NICKI
Je crois bien que vous l'avez oubliée à I'hôtel, M’sieur le Comte !?
LE COMTE, lui tire l'oreille
J'ai mal entendu. Tu veux bien répéter ?
NICKI
Disons que c'est une certitude.
LE COMTE, lui tire l'oreille
Espèce d'abruti ! Rends-toi compte... cette canne appartenait à l'un de mes ancêtre préféré et j'y tenais plus que tout au monde. (Il se blottit dans les bras de Roberto) Oh, mon dieu ! Mon cher Roberto ! Oh, mon dieu! Que vais-je devenir sans elle ?
ROBERTO
Oh, mon dieu ! Mon pauvre cristounet ! Qu'allez-vous devenir sans votre canne ? Oh, mon dieu !
LE COMTE
Oh, mon dieu, comme elle me manque: déjà ! Oh, mon dieu !
ROBERTO
Oh, mon dieu, comme elle me manque à moi aussi ! Oh, mon dieu !
LE COMTE
Oh, mon dieu ! Oh, mon dieu ! Que vais-je devenir sans elle ?
ROBERTO
Oh, mon dieu ! Oh, mon dieu ! Qu'allez-vous devenir sans elle ? (Le Comte pleurniche dans les bras de Roberto)
MISS MARYL, s'adresse à Nicki
Bonjour, jeune homme ! A qui ai-je l'honneur ?
NICKI
Moi, c'est Nicki le pêcheur; je suis originaire du port d'Inuvik.
MISS MARYL
Ce village Inuit est situé sur la côte nord-ouest canadienne, il me semble!? (Elle lui tend la main) Enchanté, Nicki ! Moi, c'est Miss Maryl.
NICKI, lui sert la main
Ravi de faire votre connaissance.
LE COMTE
Je ne sais toujours pas ce que vous êtes venu faire ici, mes amis ?
ROBERTO
C'est simple... nous nous rendions à Milwaukee pour y Fêter « Halloween », Monsieur le Comte.
LE COMTE
Je vous préviens tout de suite, vous avez fait fausse route ! En effet, vous vous trouvez en ce moment dans la mer du beaufort, au nord ouest du Canada, et non dans le lac Michigan à l'est des Etats-Unis.
MISS MARYL
Nous étions au courant, mon cher.
ROBERTO
C'est que Sylvestre avait poussé un peu trop loin son turbo hélico.
MISS MARYL
Tant est si bien qu'il nous fit faire 2000 kilomètres en trop.
LE COMTE
Monsieur Sylvestre était du voyage ?
MISS MARYL
Et lorsqu'il prit conscience qu'il s'était trompé, il décida aussitôt de rebrousser chemin.
ROBERTO
Seulement voilà, nous sommes tombés à sec en plein vol.
MISS MARYL
Nous n'avions plus une seule goutte de carburant dans nos réserves.
ROBERTO
Alors, il nous fallut atterrir en catastrophe.
MISS MARYL
Or, la question restait de savoir où et comment faire un atterrissage forcé dans l'océan ?
ROBERTO
Et puis, tout est arrivé très vite ensuite.
MISS MARYL
Sylvestre perdit complètement le contrôle de son engin.
ROBERTO
Le crash était inévitable.
LE COMTE
Vous voulez dire que Monsieur Sylvestre...
ROBERTO
J'en ai bien peur.
LE COMTE
Oh, mon dieu ! Ce n'est pas possible.
MISS MARYL
Monsieur Sylvestre a péri dans l'accident. Hélas, nous n'avons pas pu le sauver.
LE COMTE, plonge dans les bras de Miss Maryl et pleurniche
Pauvre Sylvestre ! Pauvre Sylvestre ! Et moi qui l'aimais tant !
ROBERTO, enlace le Comte et Miss Maryl
Pauvre Sylvestre ! Comme il va me manquer ! Oh, mon dieu, comme il va me manquer !
MISS MARYL-A moi aussi, il va me manquer !
LE COMTE
Pauvre facteur ! Pauvre facteur ! Et dire que c'était un homme plein de courage. Mes amis, il s'agit-là d'une perte considérable dans nos rangs. Oh ! Oh ! Oh ! Oh ! Sommes-nous peu de chose sur cette terre !
FIN DE LA SCENE 2
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ACTE 1 / SCENE 3
NICKI, LE COMTE, ROBERTO, MISS MARYL
NICKI, tient la canne à pêche en main
Vite, les amis, aidez-moi ! Je viens de faire une prise ! Dépêchez-vous !
LE COMTE, vient à sa rescousse
Tiens bon, petit, je suis là !
ROBERTO
Je parie que c'est une grosse prise.
NICKI
J'ai du mal à rembobiner le moulinet.
LE COMTE
Ne la laissons pas s'échapper ! Tirons de toutes nos forces.
Le fil de la canne à pêche casse; tout le monde est projeté en arrière; la bouteille de Whisky glisse de la poche du Comte, roule sur la banquise et tombe à la mer.
LE COMTE, tente de la rattraper
Une bouteille à la mer ! Une bouteille à la mer !
MISS MARYL, le retient par le bras
Ne faites pas l'idiot, restez ici !
LE COMTE
Je dois la récupérer à tout prix !
ROBERTO, retient le Comte par le peignoir
Je vous en supplie, Comte, ne plongez pas !
LE COMTE
Lâchez mon bras, je vous prie.
Roberto et Miss Maryl l'empêche de plonger à l'eau
MISS MARYL, le gifle
Vous êtes malade ou quoi ? C'est dangereux.
La bouteille s'éloigne.
ROBERTO
Trop tard, elle est partie !
LE COMTE
Bande d'abrutis ! Qu'avez-vous fait là ? Oh, mon dieu !
MISS MARYL, s'adresse au Comte
Encore une autre qui vous a quitté, Monsieur le Comte et j'en passe.
LE COMTE, la repousse
Oh, mon dieu, mon dieu, mon dieu !
ROBERTO, le prend dans ses bras
Quelle tragédie, mon cristounet ! Oh, mon dieu, quelle tragédie !
LE COMTE
Ohohoh ! Que va-t-il advenir de ma bonne bouteille de Whisky ?
ROBERTO
Ohohohoh ! Pauvre bouteille !
MISS MARYL, les prend tous les deux dans ses bras
Oh, mon dieu ! Comme elle va me manquer à moi aussi.
LE COMTE
je me demande ce que nous allons devenir, mon frère et ma soeur ? Rien ne va plus, ces temps-ci… le monde s'écroule; nous voici tous trois à la dérive au beau milieu de nulle part, dans cet Océan glacial !
Pendant ce temps-là, Nicki répare sa canne à pêche
LE COMTE
Et s'il le faut, autant mourir tout de suite ! Le temps est venu pour moi de rendre l'âme. Et voilà que mes souvenirs reviennent en ma mémoire à la vitesse de la lumière : « Vois se pencher les défuntes années, sur les balcons du ciel, en robes surannées; surgir du fond des eaux le Regret souriant »
ROBERTO
«Qu'as-tu fait, ô toi que voilà, pleurant sans cesse; dis, qu' as-tu fait, toi
que voilà, de ta jeunesse ? »
LE COMTE, toujours dans les bras de Roberto
« J'avais vingt ans, une folle maîtresse, de francs amis et l'amour des chansons. »
MISS MARYL, repousse Roberto et prend le Comte dans ses bras
« Le monde est fait ainsi: loi suprême et funeste ! Comme l'ombre d'un songe au bout de peu d'instants; ce qui charme s'en va, ce qui fait peine reste; la rose vit une heure et le cyprès cent ans. »
ROBERTO, repousse le Comte et prend Miss Maryl dans ses bras
« Les jours se sont enfouis, d'un vol mystérieux, mais toujours la jeunesse éclatante et vermeille fleurit dans ton sourire et brille dans tes yeux ! »
MISS MARYL, dans les bras de Roberto
« Heureux celui qui, sans paresse, l'oeil clair et les cheveux flottants, dit ces mots si doux : Ma Maîtresse ! Avec des lèvres de vingt ans . »
LE COMTE, écarte Miss Maryl et prend Roberto dans ses bras
« Mais non, ma jeunesse est finie... Adieu, doux rayon qui m'a lui, parfum, jeune fille, harmonie... Le bonheur passait, il a fui ! »
MISS MARYL, repousse le Comte, prend Roberto dans ses bras et le fixe dans les yeux « L'âme a la coureur du regard. L’âme bleue seule porte en elle du rêve, elle a pris son azur aux flots et à l’espace . »
ROBERTO, danse la valse avec Miss Maryl
« Votre âme est un paysage choisi que vont charmant masques et bergamasques, jouant du luth et dansant et quasi tristes sous leurs déguisements fantasque . »
MISS MARYL
"Mon âme est une infante en robe de parade, dont l'exil se reflète, éternel et royal, aux grands miroirs déserts d'un vieil Escurial, ainsi qu'une galère oubliée en la rade . »
NICKI, repousse Roberto, puis danse avec Miss Maryl
« D'un amant je serai le parfait modèle, trop bête pour être inconstant et trop laid pour être infidèle . »
LE COMTE, repousse Miss Maryl et prend Nicki dans ses bras
« Oisive jeunesse à tout asservie, par délicatesse j'ai perdu ma vie. Ah ! Que le temps vienne où les coeurs s'éprennent . »
Le Comte et Nicki restent figés, joue contre joue; Miss Maryl danse la valse avec Roberto...
FIN DE LA SCENE 3
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ACTE 1 / SCENE 4
ROBERTO, MISS MARYL, LE COMTE, NICKI, SYLVESTRE
Soudain, la sirène d'un navire retentit au loin...
ROBERTO
Un navire à l'horizon !
LE COMTE
Dieu soit loué, nous sommes sauvé ! (Puis il fait de grands gestes) Ohé ! Ohé ! On est là ! Ohé ! Qhé ! Ohé ! La sirène du navire retentit toujours...
MISS MARYL, ROBERTO, LE COMTE
Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé ! Par ici ! Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé !
LE COMTE
II vient dans notre direction. Ohé ! Ohé !Ohé ! Ohé ! Ohé !Ohé ! Je suis là !
La sirène du navire cesse de retentir.
MISS MARYL, ROBERTO, LE COMTE
Par ici ! Ohé !
LE COMTE
Merci Seigneur ! Merci Seigneur de nous l'avoir envoyé ! Ohé ! Ohé !
MISS MARYL
Zut ! Le navire fait demi-tour.
LE COMTE
Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé !
ROBERTO
II ne nous a pas vus.
LE COMTE
Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé !
MISS MARYL
II s'éloigne de plus en plus.
LE COMTE
Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé !
ROBERTO
Les carottes sont cuites, mes amis !
LE COMTE
Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé !Ohé !
MISS MARYL
Ce n'est plus la peine d'insister, Christophe Rodolphe, il s'en est allé à tout jamais.
LE COMTE, s'agenouille
Ô rage et désespoir ! Nous sommes fichus ! Ahahahah ! ! !
Au même instant surgit Sylvestre, allongé sur un gros cube de glace; à ses pieds repose une glacière.
SYLVESTRE
Salut la compagnie ! La vie est belle ?
MISS MARYL, ROBERTO, ROBERTO
Monsieur Sylvestre !
SYLVESTRE
Au lieu de me fixer comme un revenant, aidez-moi plutôt à descendre de mon embarcation. (Il tend la main) Alors, c'est pour aujourd'hui ou pour demain ?
MISS MARYL
Ce ne peut-être vous, Monsieur Sylvestre.
SYLVESTRE
Non, c'est son ombre ! Bon, ça suffit ! Vous voulez ma photo ou quoi ?
ROBERTO, l'aide à descendre
On vous croyait mort à tout jamais, mon ami.
SYLVESTRE
Comment, couillon, tu veux déjà m'enterrer ?
LE COMTE, lui saute au cou
Heureux de vous savoir en vie, facteur !
SYLVESTRE
Ex facteur !
LE COMTE, l'embrasse
Vous représentez pour moi une lueur d'espoir. Je vous aime !
SYLVESTRE
Ca par exemple ! Ne me dites pas que c'est vous, Monsieur le Comte de la Bouche-en-Biais ?
LE COMTE
Merci Seigneur ! Merci Seigneur ! Merci Seigneur !
SYLVESTRE, le repousse
Oh, couillon ! Cessez de me coller comme une ventouse !
LE COMTE, lui embrasse les pieds
Sans vous, la vie sur terre aurait perdu toute sa signification. Merci Seigneur ! Merci Seigneur !
SYLVESTRE
C'est bien la première fois que vous m'adulez autant, Monsieur le Comte. Auparavant, j'avais le droit: à des coups de bâton ou bien des coups de pieds aux fesses ou bien encore au tirage de\maillot, au tirage d'oreilles, au tirage de cheveux... enfin bref, à toute la panoplie des sévices corporels dont Monsieur le Comte a recours pour se défouler. (Puis) Eh bien, ma fois, je vais en profiter un max ! Vas-y, grand couillon, baise¬-moi les pieds ! Lèche-moi les orteils !
LE COMTE
Doux Seigneur ! Vous êtes vivant, Sylvestre !
SYLVESTRE
A propos, Comte, j'ai une petite surprise pour vous. (Il sort une bouteille de whisky de sa poche) Dites, ce ne serait pas à vous, ça, par hasard ?
LE COMTE, se saisit de la bouteille et la serre dans ses bras
Miracle ! Te revoilà, ma chérie ! Sans toi, la vie devenait si monotone.
SYLVESTRE, en aparté
C'est vraiment lamentable !
MISS MARYL, lui tape sur l'épaule
Je vous félicite, Monsieur le revenant ! Dans un tel crash, les chances de survie sont toujours extrêmement limitées.
ROBERTO, lui tape sur l'épaule
Bravo, mon vieux ! Vous êtes un homme vaillant, courageux, un exemple pour tous vos compatriotes.
SYLVESTRE
Figurez-vous que j'ai été pompier dans une autre vie.
MISS MARYL
Vous êtes un casse-cou, un mercenaire; le danger ne vous fait jamais peur, vous surmontez tous les obstacles sans aucun problème.
SYLVESTRE
Dites-moi, les deux tourtereaux, vous ne seriez pas en train de me faire l'horoscope ?
ROBERTO
Vous êtes un James Bond des temps modernes ! Vous êtes un
Superman !
SYLVESTRE
Allez-y les cocos, allez-y, flattez mon ego ! Tiens, tant que vous y êtes, baisez-moi les pieds aussi.
MISS MARYL
Le corps humain ne peut pas tenir plus de 5 minutes dans une eau où la température est aussi glaciale.
SYLVESTRE, désigne le gros cube de glace
C'est grâce à ce gros glaçon si je suis en vie; c'est lui que vous devez embrasser, caresser, enlacer, lécher. Car, dans la minute qui suivit le crash, il apparut devant moi telle une bouée de sauvetage; alors j'ai grimpé dessus, puis je me suis laissé porter par les flots jusqu'à vous. Et voilà ! C'est aussi simple.
ROBERTO
Une chance pour vous qu'il soit passé par là, Sylvestre.
FIN DE LA SCENE 4
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ACTE 1 / SCENE 5
ROBERTO, MISS MARYL, LE COMTE, SYLVESTRE,
NICKI, L’ALBATROS
LE COMTE
Vous êtes né sous une bonne étoile, Sylvestre.
SYLVESTRE
Quant à vous, Monsieur le Comte, vous devez sûrement avoir la lune en scorpion.
LE COMTE
C'est quoi qui vous fait dire ça ?
SYLVESTRE
Je trouve que vous accumulez beaucoup de galères depuis quelques années.
LE COMTE, le prend par l'épaule
Voyez-vous, mon pote, cette fois-ci ce sera la dernière... que vous allez d'ailleurs vivre à mes cotés, et ce, jusqu'au bout. Et dans cette galère, croyez moi, il n'y aura point de retour...nous courons tout droit à la catastrophe. Les courants magnétiques nous emportent à notre perte... nous allons plonger dans un gouffre !
SYLVESTRE
Eh bé, moi, à la première occase, je mets les voiles.
LE COMTE
Ne croyez pas si bien dire, facteur, ne croyez pas si bien dire.
SYLVESTRE
Ex facteur !
LE COMTE, lui tend la bouteille
Tenez, vous l'avez quand même bien mérité !
SYLVESTRE, repousse la bouteille
Désolé, mon pote, mais comme mes fidèles lecteurs le savent, depuis mon voyage en Ecosse, j'ai horreur du whisky ! (Puis) Mais par contre... par contre... (Il escalade le gros cube de glace puis récupère la glacière) Voyez vous, messieurs dames, la seule chose que j'ai pu récupérer dans les débris, c'est ma glacière.
ROBERTO
Renfermerait-elle un trésor ?
SYLVESTRE
Plusieurs trésors ! A commencé par celui-ci. (Il ouvre le couvercle, plonge sa main dans la glacière, se saisit d'un cahier qu'il remet à Miss Maryl) Tenez, ma jolie ! C'est bien votre livre de chevet ?
MISS MARYL, se saisit du livre
Dieu soit loué ! Mon exposé ! Vous êtes un amour, Sylvestre !
(Elle l'embrasse sur la joue)
SYLVESTRE, replonge sa main dans la glacière puis en sort une bouteille de vin
Quant à nous, messieurs, nous allons trinquer ensemble ! Qu'en dites-vous ? (Il donne la bouteille à Roberto)
ROBERTO
Du « Champinelle ! »
SYLVESTRE
Vous tenez dans vos mains une pièce rare,
ROBERTO
Le « Grand cru Millenium ! »
LE COMTE, veut se saisir de la bouteille
Donnez-moi cette bouteille, Roberto !
ROBERTO
Bas-les-pattes, mon pote ! Ce breuvage est pour nous tous. (Il repasse la bouteille à Sylvestre)
LE COMTE
Je vous rappelle qu'il provient de ma propriété viticole.
SYLVESTRE
Donner, c'est donner, reprendre c'est voler !
LE COMTE
Rendez-moi cette bouteille immédiatement !
Sylvestre passe la bouteille à Roberto qui la lui repasse aussitôt, et ainsi de suite pendant quelques secondes...
LE COMTE
Je vous préviens, ça ne se passera pas comme ça !
SYLVESTRE
Je présume que vous comptez faire appel à votre avocat.
LE COMTE
Rendez-la-moi, un point c'est tout !
MISS MARYL, le nez pointé vers le ciel
Voyez dans le ciel, mes amis ! Voyez dans le ciel ! Voyez comme cet albatros déploie ses ailes majestueuses !
NICKI
Voilà près d'une heure qu'il nous suit.
SYLVESTRE
II doit en avoir ras-le-bol de voler.
LE COMTE
Je suis sûr qu'il veut nous manger.
ROBERTO
Voyons, qu'allez-vous imaginez-là ? Cet oiseau est inoffensif.
MISS MARYL
Regardez, il vient vers nous !
ROBERTO
Ah ! Je crois bien qu'il veut se poser ?
SYLVESTRE
Ce doit être crevant pour lui de battre des ailes toute la journée !?
L'albatros se porte à la hauteur de nos amis, tout en poussant des cris stridents; puis il tourne autour d'eux...
LE COMTE, effraie l'oiseau avec sa bouteille de whisky)-Va-t’en, sale bête! Va-t-en !
MISS MARYL, gifle le Comte
Ne l'effrayez pas, imbécile !
ROBERTO
C'est drôle, j'ai comme l'impression qu'il cherche à nous communiquer quelque chose.
NICKI
II veut nous prévenir d'un danger.
ROBERTO
Ah oui ?
NICKI
II ne souhaite pas qu'on aille plus loin.
L'albatros disparaît ensuite dans les airs
MISS MARYL
Que voulez-vous dire par là ?
NICKI
Nous nous rapprochons du cercle polaire.
LE COMTE
Les courants magnétiques nous entraînent dans un gouffre, mes amis ! Je me tue à vous le répéter depuis tout à l'heure ! Sauve qui peut ! A l'aide ! A l'aide ! A l'aide !
MISS MARYL, gifle le Comte
Fermez-Ia, voyons !
SYLVESTRE, s'adresse à Nicki
C'est quoi cette histoire de gouffre, mon petit ?
LE COMTE, s'agenouille
Je vous le dis, ç'est la fin, les amis ! Oh, mon dieu !
MISS MARYL
Taisez-vous !
ROBERTO, s'adresse à Nicki
Expliquez-vous.
NICKI
Quand j'étais petit, mon grand-père me parlait toujours des courants magnétiques... il disait qu'il fallait s'en méfier... il disait surtout...
L’ALBATROS, atterrit sur la banquise à ce moment-Ià
Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipages
Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,
Qui suivent indolents compagnons de voyage,
Le navire glissant sur les gouffres amers.
A peine les ont-ils déposés sur les planches,
Que ces rois de l'azur, maladroits et honteux,
Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches
Comme des avirons traîner à coté d'eux.
Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule !
Lui, naguère si beau, qu'il est comique et laid !
L'un agace son bec avec un brûle-gueule,
L'autre mime en boitant, l'infirme qui volait !
Le poète est semblable au prince des nuées
Qui hante la tempête et se rit de l'archer;
Exilé sur le sol au milieu des huées,
Ses ailes de géant l'empêchent de voler.
Charles Baudelaire (Les fleurs du mal)
Puis l'albatros s'envole...
FIN DE LA SCENE 5
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ACTE 1 / SCENE 6
LE COMTE, SYLVESTRE, ROBERTO, MISS MARYL, NICKI
Le soleil se couche lentement...
MISS MARYL
Eh bien, voilà qui semble plus clair, messieurs.
LE COMTE, désigne Nicki du doigt
Cet oiseau de malheur est habité par l'esprit de son grand-père, c'est moi qui vous le dis !
SYLVESTRE, l'assomme avec la bouteille
Tu vas la fermer ta grande gueule !
ROBERTO
Mais d'ici-là, quelqu'un se portera à notre secours.
MISS MARYL
Je vous trouve bien optimiste, Roberto.
ROBERTO
Quelque soient les dangers rencontrés dans la vie, j'ai décidé de rester positif… je m'en remets à ma destinée.
SYLVESTRE, débouche la bouteille de vin
Bon, qu'est-ce qu'on attend pour boire ce « Champinelle » ?
ROBERTO, s’apprête à boire au goulot
Avec plaisir, Sylvestre ! S'il faut quitter ce monde, autant que ce soit dans la gaîté !
MISS MARYL, lui arrache la bouteille des mains
En voilà une façon de boire, Roberto !
SYLVESTRE
Ne vous en faites pas, ma petite dame, Monsieur Sylvestre a plus d'un tour dans son sac. (Il plonge sa main dans la glacière, puis en sort des gobelets) J'avoue que c'est plus « class » de trinquer avec un gobelet.
Roberto remplit les gobelets
SYLVESTRE, tend son verre
A votre santé, chers compagnons !
ROBERTO, lève son verre
Voici venu le temps de vivre, de penser et d'aimer la vie !
Soudain le chant mélodieux des bélougas retentit...
LE COMTE, se relève
Ah non ! En voilà assez ! Ca ne va pas recommencer.
NICKI
C'est le chant harmonieux des bélougas, M’sieur le Comte, qui annonce en fanfare le coucher du soleil.
LE COMTE, hurle
Vos gueules, grosses bêtes hideuses ! Vos gueules !
Les bélougas s'arrêtent de chanter...
LE COMTE
Ouf, je respire ! Que c'est bon le silence !
SYLVESTRE, apporte un gobelet au Comte
A votre santé, Majesté !
LE COMTE
Je refuse de boire du « Millenium » dans un gobelet en plastique.
SYLVESTRE
Arrête de faire du chiqué, mon pote, tu vois bien qu'on est tous dans la même galère ! Allez, pas de manières !
LE COMTE, se saisit du gobelet et de la bouteille
Soit ! (un temps) Compagnons Balladins, je porte un toast à notre belle amitié !... ainsi qu'à cette dernière aventure que nous allons vivre ensemble sous le ciel étoilé aux confins du cercle polaire ! Laissons-nous porter au gré du vent vers notre destinée à tous ! (Il boit son verre d'un seul trait et jette son verre à la mer) Mes adieux à mon ancienne fiancée ! (Il s'immobilise, les yeux fixés sur l'océan)
MISS MARYL
A la votre, Christophe Rodolphe et j'en passe !
NICKI
Mes compagnons, ce soir, la température va chuter considérablement. Blottissons-nous les uns contre les autres.
MISS MARYL, le livre en main
Dites-moi, Sylvestre, vous n'auriez pas une bougie, par hasard, dans votre boîte à malices ?
SYLVESTRE
Je regrette, ma petite mère, mais ce n'est pas écrit « quincaillier » sur mon front !
NICKI, lui apporte sa lanterne
Tenez, mademoiselle, vous pouvez utiliser ma lanterne.
MISS MARYL, lui fait un bisou sur la joue
Vous êtes un amour, Nicki ! Grâce à vous je vais pouvoir m'occuper un peu l'esprit.
Le Comte fixe toujours la mer, la bouteille de vin à la main
SYLVESTRE, plonge sa main dans la glacière pour en sortir un marteau et un burin, et s'adresse ensuite à Roberto et à Nicki
Si ces deux messieurs veulent bien me prêter main forte... j'ai besoin de deux costaux pour charger ce gros glaçon sur la banquise ! (Il désigne le gros glaçon du doigt)
ROBERTO
Vous ne comptez pas vous mettre à la sculpture, Monsieur Sylvestre ?
SYLVESTRE
Voyez-vous, je compte casser la glace pour en faire un iglou; par les temps qui courent, on n’est pas à l'abri d'une tempête. Suivez-moi !
ROBERTO
Ces temps-ci, j'ai mal au dos, voyez-vous...
NICKI
Je suis désolé, Monsieur, mais je dois réparer ma canne à pêche ! (Il fait demi-tour et va réparer sa canne à pêche)
SYLVESTRE
Bande de dégonflés ! Mais enfin... Heureusement que je fus pompier autrefois et que je peux encore compter sur mes biceps !
Sylvestre plonge sa main dans la glacière, prend une corde et entoure le glaçon avec; Le Comte fixe toujours la mer, la bouteille de vin à la main...
FIN DE LA SCENE 6
FIN DE L’ACTE 1
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EPILOGUE
ROBERTO, MISS MARYL, LE COMTE, NICKI, SYLVESTRE
Sylvestre prend l'autre extrémité de la corde et se l'entoure autour de la taille, puis tire le gros glaçon de toutes ses forces péniblement; Entre temps, Nicki a réparé le fils de sa canne à pêche; à présent, il fait le lancer; Miss Maryl a le nez plongé dans son livre et ne dit mot; le Comte continue de fixer la mer; Roberto s'assoit auprès de Miss Maryl...
ROBERTO
Vous voulez que je vous tienne la lanterne ? (Puis) Que contiennent ces écritures ? (Puis) Il s'agit de votre bibliographie ?
MISS MARYL, lève la tête
C'est l'objet de mes recherches que j'exposerai lors d'un séminaire à Londres l'an prochain.
ROBERTO
Si toutefois vous êtes encore en vie, ma chère ?
MISS MARYL
Le sujet de l'exposé sera l'immortalité et la longévité.
ROBERTO
C'est le comble !
MISS MARYL
Vous savez, lorsqu'on lit les journaux scientifiques et magazines populaires à gros tirage, on constate que dans tous les pays, s'opère une véritable offensive de la médecine et de toutes les disciplines connexes contre les conséquences fâcheuses du vieillissement humain.
ROBERTO
Et pourtant, Naître, grandir, s'épanouir, vieillir, enfin mourir est le lot inéluctable de chaque être humain depuis tout temps.
MISS MARYL
En d'autre terme, la fatalité biologique domine l'être humain ici-bas: l'homme mortel vit dans un corps physique toute sa vie durant, puis disparaît du plan terrestre après un laps de temps, plus ou moins long, subissant en bout de courses les terribles effets du vieillissement.
ROBERTO
C'est vraiment court une vie d'homme !
MISS MARYL
Le plus étonnant est ce qui se produit sur le plan psychologique, dont la durée semble se poursuivre à un rythme beaucoup plus lent au cours de l'enfance.
ROBERTO
II est vrai que les enfants vivent dans un temps qui n'est pas du tout celui de l'adulte.
MISS MARYL
II est incomparablement plus étendu, et le rythme vécu est beaucoup plus long.
ROBERTO
J'attends la suite avec impatience.
MISS MARYL
Eh bien, voilà: autrefois, les alchimistes prétendaient détenir en leur possession l'élixir de longue vie, sorte de préparation liquide qui leur procurait soi-disant un triomphe total sur la mort et qui leur donnait le moyen efficace de prolonger considérablement leur existence.
ROBERTO
C'est la plus célèbre des formes revêtues par les vieux rêves humains qui vise à dépasser notre condition de simples mortels et de vaincre la double malédiction qu'apportent la mort et le vieillissement.
MISS MARYL
Une autre méthode consisterait à appliquer sur soi des techniques secrètes de régénération corporelle qui aboutiraient à faire disparaître tous les signes extérieurs de décrépitude physique, obtenant la repousse des cheveux et des dents. Les procédés de rajeunissement ne manquent pas.
ROBERTO
Les bains rajeunissant et toute une série de règles hygiéniques.
MISS MARYL
Prenons le cas de l'amiral Byrd qui, durant l'hiver 1934, décida de séjourner en solitaire dans une base météorologique avancée de l'Antarctique, afin d'y faire des expériences scientifiques tel que le rajeunissement par la volonté, en utilisant uniquement le pouvoir actif de la pensée, aidé de moyens théoriquement simples comme les techniques de respiration. Au bout d'un an, il aurait obtenu des résultats merveilleux; à commencer par la repousse des cheveux et des dents, mais aussi de la disparition des rides et du retour intégral de sa vue. Fascinant, n’est-ce pas ?
ROBERTO
Comment se fait-il que l'amiral Byrd soit allé dans l'Antarctique pour y vivre une telle expérience au lieu de rester bien au chaud chez lui.
MISS MARYL
Disons que c'est une sorte de retraite qu'il voulait s'octroyer. Toujours est-il que l'amiral disparut ensuite, et qu'il emporta avec lui d'autres secrets. Dommage ! la science tenait-là un spécimen rare.
ROBERTO
Il n'existe aucun compte-rendu de son témoignage ?
MISS MARYL
Voyez-vous, l'amiral Byrd n'est jamais rentré au pays.
ROBERTO
On a bien pu l'enregistrer quelque part ?
MISS MARYL
En ce temps-là, le dictaphone n'existait pas, ainsi que le téléphone par satellite.
ROBERTO
Ce n'est pas croyable !
Le Comte verse du vin dans l'océan et s'agenouille sur la banquise...
SYLVESTRE, détache sa corde, se saisit de la bouteille, puis moleste le Comte qui ne bronche pas
Espèce de fada ! Tu vas me le payer très cher ! C'est pour m'enquiquiner que tu as fait ça, hein ? Enfoiré !
ROBERTO, intervient
Que se passe-t-il, Sylvestre ? Laissez-le tranquille !
SYLVESTRE
Il est complètement à la masse, ce jobard ! Il vient de vider du millenium à la flotte. (Puis) Je vais te casser la tête, Monsieur le Comte de la bouche-en-Biéééééé ! ! ! !
ROBERTO, le retient par un bras
Arrêtez, voyons ! Arrêtez !
LE COMTE, se relève et titube dans tous les sens
« J'ai, quelque jour, dans l'Océan,
(Mais je ne sais sous quels cieux),
Jeté, comme offrande au néant,
Tout un peu de vin précieux...
Qui voulut ta perte, Ô liqueur ?
J'obéis peut-être au devin ?
Peut-être au souci de mon coeur,
Songeant au sang, versant le vin ?
Sa transparence accoutumée
Après une rose fumée
Reprit aussi pure la mer...
Perdu ce vin, ivres les ondes !...
J'ai vu bondir dans l'air amer
Les figures les plus profondes...
Paul Valéry (Le vin perdu-Charmes)
ALBATROS, atterrit se pose sur la banquise ensuite
Oh ! combien de marins, combien de capitaines
Qui sont partis joyeux pour des courses lointaines,
Dans ce morne horizon se sont évanouis !
Combien ont disparu, dure et triste fortune !
Dans une mer sans fond, par une nuit sans lune,
Sous l'aveugle océan à jamais enfouis !
Combien de patrons morts avec leurs équipages !
L'ouragan de leur vie a pris toutes les pages
Et d'un souffle il a tout dispersé sur les flots !
Nul ne saura leur fin dans l'abîme plongée.
Chaque vague en passant d'un butin s'est chargée;
L'une a saisi l'esquif, l'autre les matelots !
Nul ne sait votre sort, pauvres têtes perdues !
Vous roulez à travers les sombres étendues,
Heurtant de vos fronts morts des écueils inconnus.
Oh ! Que de vieux parents, qui n'avaient plus qu1un rêve,
Sont morts en attendant tous les jours sur la grève
Ceux qui ne sont pas revenus !
Victor HUGO (Extrait de Oceano nox / Les Rayons et les Ombres)
Puis jaillit hors de l'eau un bélouga (mammifère marin); il bondit au dessus de la banquise; tout le monde se couche rapidement, sauf le Comte. Le grand cétacé réapparaît une seconde fois, bondit sur le Comte, prend ce dernier dans sa gueule et l'emporte avec lui au fond des eaux...
FIN DE l’EPILOGUE
FIN DU 48-ième épisode
AFFAIRE A SUIVRE DANS LE 49-ième épisode intitulé :
« LES COURANTS MAGNETIQUES »
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(c) emilien casali - Créé à l'aide de Populus.
Modifié en dernier lieu le
26.08.2021
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